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Un RDV à ne pas manquer

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Message  HannibalaTor Sam 29 Déc - 18:57

C’est jeudi aujourd’hui. J’aime bien le jeudi, parce que c’est la veille du vendredi, qui est la veille du week-end ! Puis le vendredi, les gens sont de bonne humeur au bureau. Alors moi j’ai décidé d’être de très bonne humeur, dès le jeudi !
- « Olivier, le Président vous attend ».
Mon Dieu mais qu’est-ce qu’elle peut m’énerver cette vieille pimbêche de Madame Racht (déjà son nom… On dirait Reich), avec sa voix égrillarde et sa garde-robe qui date de Mathusalem !
Je me demande comment mon patron, un homme si plein de bon sens, peut la garder comme « Assistante de Direction » (faut surtout pas dire « secrétaire », sinon cette vieille harpie s’énerve). Je suis sûr qu’elle a une kalachnikov dans son vieux sac à main.
Et tant qu’à me demander des trucs, que peut-il bien me vouloir, le big boss ? Une promotion peut-être !
Allez, un coup de spray à la menthe, un coup de brosse sur ma coupe à la Gi-Joe, et en voiture Simone, on monte chez Dieu !

Je frappe à la porte…
- « Entrez Olivier, je vous attendais ».
Il est comme ça notre président, il sait toujours qui frappe... J’adore ce mec. Il m’a pris son aile il y a dix ans et m’a tout appris du métier, ou presque.
Il est affairé sur son PC au moment où j’entre dans son somptueux bureau.
- « Bonjour Président. Vous êtes encore en train de draguer sur Internet ? ». Allez savoir pourquoi, ça le fait rire quand je dis ça. Et moi j’aime bien quand il rit, parce que son rire est tout simplement spectaculaire.
- « Non, je vous laisse ce loisir. Si ça ne vous dérange pas, nous allons parler business ». Quand il vous dit ça, ce cher Président, il a beau le dire avec l’air le plus affable du monde, vous savez que c’est le moment de mettre les blagues au placard et d’ouvrir grand les écoutilles. Mais bon, c’est dans ma nature d’en rajouter…
- « Vous n’y pensez pas Président, vous savez que draguer me répugne. On dirait que je fais des heures supplémentaires en voulant me vendre ! ».
Ben oui, je suis vendeur. Attention hein, pas vendeur d’opérette. Je suis le meilleur vendeur de la société. Faudrait voir à ne pas me prendre pour un vendeur amateur.
Il sourit mais me fait comprendre gentiment que maintenant, j’ouvre le placard pour y mettre mes blagues, et il m’invite à m’asseoir sur sa table de réunion.
- « Olivier, j’ai besoin de vous. Nos résultats sont bons cette année [tu m’étonnes chef, avec tout ce que j’ai signé comme contrats !], les vôtres tout particulièrement [j’adore ce mec, je vous le dis !]. Mais il y a une ombre au tableau [hein ? Comment ça une ombre ?]. Connaissez-vous la société Chassagne ? ».
Euh franchement non… Je dirais bien « oui, de nom », mais le vieux est trop malin et va voir que je dis ça pour ne pas avoir l’air d’un nigaud… Allez, on la joue jeu de la vérité. Et il le mérite bien. Puis ça fait partie du deal que je ne sache pas tout. Après tout, c’est lui le big boss !
- « Ben en fait pas du tout… Pourquoi ? ».
- « La société Chassagne, c’est mon échec… Aucun de mes vendeurs n’est jamais parvenu à décrocher d’affaire auprès d’elle, et je mets un point d’honneur à changer cela ».
Rah mais mon cher Président, je suis l’homme de la situation ! Je suis ton meilleur vendeur, c’est pas un Chassagne qui va me résister ! Bon, je vais tout de même formuler ça autrement…
- « Président, connaissez-vous les raisons de ces échecs répétés ? ». Là je sais que je marque des points, le vieux il sait qu’un bon vendeur, ça pose avant tout des questions.
- « Oh mais c’est très simple mon cher Olivier. Chassagne est dirigée par un redoutable PDG, qui gère en direct les achats dits stratégiques. Et vous savez que notre métier – la sécurité – est un enjeu stratégique. Donc j’ai répondu à votre question, vous connaissez l’obstacle ».
Ah ben un peu que je sais que c’est stratégique la sécurité, c’est ce que je raconte 10 heures par jour à nos clients ! Y en a pas un qui m’a résisté, c’est pas un vieux teigneux qui va commencer. J’aime le défi !
- « Président, je vais faire de mon mieux. Je vais le manger, le Chassagne moi ! ». Mince, j’y vais peut-être un peu fort là…
- « Mais mon cher Olivier, je ne demande que ça. J’ai une bonne nouvelle, Valérie vous a obtenu un RDV pour demain matin à 11 heures. Vous savez ce qu’il vous reste à faire ».
Elle est sympa Valérie. Elle assure en prise de rendez-vous, et en plus elle est vraiment gentille. Si seulement un jour elle pouvait remplacer cette vieille harpie de Racht…
- « Oui Président. Vous ramener le beau contrat qui vous résiste depuis tant d’années ».
Le vieux esquisse un sourire et me raccompagne à la porte de son bureau. Nous nous quittons sur une poignée de main chaleureuse.

Bon, ce soir c’est billard. J’aime bien aller jouer au billard avant d’aller à un RDV important. C’est ma méthode personnelle de préparation psychologique.
Après ça, une douche et au lit, en m’endormant devant une série télé. Je mets le réveil à 7 heures, comme ça je pourrai me rendormir encore une demi-heure avant de me lever. Ca c’est de la stratégie de winner !

Ah, comme c’est bon de se réveiller en musique. Tous les matins, c’est Nelly Furtado qui me réveille. Non non, elle ne vit pas chez moi… C’est juste que j’ai un vieux radio-CD-réveil, et que j’aime bien me réveiller avec « Turn-Off the Light ».
Allez, je gratte une demi-heure. A tout’ Nelly.
Fichtre, j’ai eu le temps de rêver ! Ah, je le mangeais tout cru le père Chassagne. C’est un bon présage !
50 pompes et quelques abdos, douche, chocolat et tartines. Prêt pour bouffer le monde. Bon, je vais tout de même m’habiller, cela dit…
J’arrive au bureau à 8 heures 30 pétantes. J’aime bien arriver avant mes collègues. Déjà parce que le matin quand ils arrivent, ils racontent leurs histoires de beuverie de la veille, et que ça franchement, ça m’horripile, et puis en plus, je vais faire un peu de charme à Valérie pour qu’elle me refile les meilleurs RDV. Ils n’ont qu’à arriver plus tôt, ces piliers de bistrot ! Et puis être sympas avec Valérie.
Ce matin, je ne me renseigne que sur Chassagne. Je prends le dossier, et je file dans mon bureau.
Oh la vache, mais il n’y a rien dans ce dossier ! Pas étonnant que mes cornichons de collègues n’aient jamais conclu. Ce dossier est aussi rempli que la mère Racht est avenante. C’est dire.
Allez, un coup d’Internet pour regarder le site web de la société, on va bien voir à quoi ça ressemble cette boîte.
La vache ! 8 000 m² d’entrepôts et 4 000 m² de bureaux ! Jackpot ! Dans notre métier, ça marche quasiment au mètre carré.
Allez, je rentre tout ça dans la super application que mon pote Fred, de l’informatique, a pondu à ma demande… Verdict dans quelques secondes…
Youhou ! 225 000 euros de business ! Calculé à l’arrache. Punaise, si il y a du câblage à faire, j’en rajoute encore pour 50 000 euros. Allez, petite danse de la victoire anticipée. Chassage, sors ton chéquier, tu vas douiller mon gars !
Je consulte tout de même les comptes… Punaise, ils sont bourrés de pognon ! C’est bon, pas de soucis de financement. Je déteste ramener une affaire juteuse et devoir batailler avec les leasers.
Tiens, quelqu’un frappe à la porte… Je regagne mon fauteuil et me replonge le nez sur le PC, faudrait voir à ne pas passer pour un ratisseur de dancefloors…
- « Entrez ».
Ouh, j’ai bien fait de ma rasseoir, c’est le big boss…
- « Bonjour Olivier. Comment allez-vous ? Prêt pour le RDV de ce matin ? ».
- « Bonjour Président. Tout à fait, je suis sur le dossier d’ailleurs. Qui est fort vide ma foi, mais j’ai fait des recherches sur Internet ».
- « Je vous reconnais bien là. C’est pour cela que je vous envoie là-bas, notamment ».
Comment ça « notamment » ? Bah, passons. Le reste, ça doit être parce que je suis un vendeur génial !
- « D’ailleurs il est 10 heures. Je vais y aller. Je vous tiens au courant dès ma sortie du RDV. Je pense emmener notre client déjeuner ensuite ».
- « Faites donc cela Olivier. Nous nous voyons dans le courant de l’après-midi ».
Allez, les clefs de la voiture, ma serviette en cuir, mon ordi, mon dossier et ça roule.

Ca a bien roulé ce matin. Faut dire que les superbes locaux sont perdus dans la pampa ; j’ai croisé plus de tracteurs que de Mercedes.
N’empêche, le site est impressionnant. J’ai dix minutes d’avance, tiens.
Ca tombe bien, j’ai le temps de fumer une clope. Je fais toujours attention à ne pas rentrer chez les clients trop en avance, ça fait « mort de faim ». C’est pas moi qui vais avoir faim, c’est le père Chassagne qui va avoir faim quand je vais lui avoir montrer ce que c’est que de la vidéosurveillance en l’an 2012. Il va être bluffé, ce vieux radin qui résiste depuis si longtemps.
Allez, 11 heures moins cinq. Banzaï !
Ben dis donc, un vrai maitre corbeau le Chassagne. Son ramage se rapporte bien à son plumage... C’est super beau ses locaux. Je sais maintenant où il a mis le pognon de la vidéosurveillance ce vieux filou ! Il est installé comme un nabab. La banque d’accueil est au moins à 15 mètres du sas d’entrée… Impressionnant.
- « Bonjour Madame, Olivier de Securitex. J’ai rendez-vous avec Monsieur Chassagne ». J’ai failli dire « je viens plumer Maître Corbac »… M’enfin je ne suis pas comme ça…
- « Bonjour Monsieur. Veuillez patienter un instant. Quelqu’un va venir vous chercher ».
Je m’exécute. Je prends place sur l’un des confortables fauteuils du salon d’attente. Ah le vieux fourbe, il utilise toutes les vieilles méthodes. Le fauteuil bien moelleux qui t’engloutit si tu prends tes aises. Tes vieilles tactiques Jedi n’ont pas d’effet sur moi, vieux grigou ! Je reste le cul posé au bord, le dos droit, prêt à tout, et concentré sur mon objectif. Bon, je vais tout de même lire un des magazines posés sur la table basse… Punaise, mais que c’est pénible ça, toujours les mêmes titres dans ces sociétés… Magazines économiques, le Figaro du jour… Manquerait plus que quelques « Modes et Travaux », et je me croirais chez ma coiffeuse tiens. Moi qui n’ai jamais été abonné qu’à des magazines auto-moto et à Playboy…
Bon allez, je vais prendre Capital. Ca va faire genre commercial qui s’intéresse à l’actualité…

Un bruit de talons aiguilles sur le parquet me sort de ma torpeur feinte… J’espère que ça n’est pas la sœur jumelle de la mère Racht… Allez, je lève les yeux…
C’est un très charmant corps de motarde, monté sur une paire de jambes à faire pâlir les publicitaires de chez Dim ! J’appréhende tout de même, elle s’est approchée de la banque d’accueil et elle a encore son casque. Si ça se trouve, en-dessous du casque il y a Dark-Vador. Elle l’enlève et échange quelques mots avec la réceptionniste, qui me montre du doigt (comme c’est vilain !). N’empêche, elle est rock& roll la demoiselle… Elle se retourne et s’approche de moi.
Oh mon Dieu ! Ah mais ça n’est pas du tout la jumelle de la vieille harpie ! C’est tout simplement une bombe atomique qui vient me chercher ! Ben dis donc, faudra que j’en parle au vieux. Il pourrait envoyer la mère Racht à la retraite et nous en embaucher une aussi jolie à la place…
Alors que la charmante demoiselle s’approche de moi, j’essuie la bave qui sort de ma bouche et me ressaisi. Je regrette d’avoir fumé juste avant, je dois avoir une haleine de chacal !
- « Bonjour Olivier. Vous êtes pile à l’heure. Bravo. Veuillez me suivre je vous prie ».
- « Bonjour Mademoiselle. J’ai fait de mon mieux ». Non mais quel faux-cul je fais parfois… Sinon, elle est vraiment très charmante, mais elle donne dans le factuel par contre.
N’empêche, il est déjà l’air plus sympathique à mes yeux le vieux Chassagne. Il m’envoie Miss France pour m’accueillir. Ca fait plaisir.
Je suis la charmante demoiselle, en veillant bien à ce que mes yeux ne s’attardent pas là où la bienséance me l’interdit. Non pas que je n’en ai pas envie, mais enfin sait-on jamais, si elle se retournait et me voyait admirer son anatomie, je sens que je marquerais des mauvais points auprès du vieux. Des fois qu’elle soit une vilaine petite rapporteuse et qu’elle lui répète.
Nous prenons l’escalier et montons au premier étage. Miss France m’emmène dans une salle de réunion qui rendrait jaloux nos ministres. Elle me présente un fauteuil. J’aurais préféré une photo dédicacée, mais enfin le fauteuil ça va tout de même être plus pratique pour m’asseoir. Bon, en attendant que le père Chassagne n’arrive, je vais converser un peu avec Miss France.
- « Alors comme ça, vous venez au travail en scooter », lui dis-je, un brin hâbleur.
- « Vous y êtes presque. Mais je roule en 1100 GSXR ».
Mais elle se fout de moi Miss France ! Elle doit peser 50 kilogs, marche avec des talons aiguille (montés au bout de très jolies bottes en cuir) et me dit qu’elle roule sur une bête de course…
Elle semble avoir deviné mes pensées, la petite maline, et comme nous sommes proches de la fenêtre, elle me désigne du doigt son rutilant destrier mécanique. Ben non, pas de scooter, elle ne s’est pas foutu de moi. La vache, je n’en reviens pas… Va falloir enchaîner. Je vais éviter de lui demander si elle habite encore chez ses parents…
- « Maintenant que vous avez vu ma mobylette, je vous propose de passer au vif du sujet ».
« Mobylette »… Si si, elle se fout de moi finalement. Va falloir assurer maintenant… Et patienter jusqu’à ce que le vieux arrive, en évitant de refaire une bourde.
- « Euh d’accord… Vous savez pourquoi je suis là aujourd’hui ? ».
Là, elle me lance un regard terrifiant, genre « dis donc jeune crétin sûr de toi, tu me prends pour une idiote qui ne sait pas ce que viennent faire les visiteurs de mon patron ? »…
- « Alors voilà, je viens présenter à votre entreprise les services de ma société, spécialisée dans le domaine de la sécurité en général, et de la vidéosurveillance en particulier ». Tiens, prends ça Miss France ! En même temps, je fais tout le contraire de ce que je dois faire. Je « discute » au lieu de poser des questions. Après tout, je peux peut-être glaner quelques infos auprès de Miss France…
- « Mais c’est passionnant dites-moi… ».
Mais dites donc, c’est qu’elle a déjà pris le rythme de se foutre de moi à chaque phrase, la vilaine ! J’encaisse, à défaut d’avoir pu esquiver.
- « Certes, mais dites m’en plus sur votre société je vous prie ».
Et là, Miss France elle me fait un exposé franchement excellent, me présente la société, son métier, à savoir grossiste en électro-ménager « brun » = plein de téléviseurs écran plat qui valent tout plein de pognon et qu’il va falloir vidéosurveiller vite fait avant que les petits cochons ne les volent dans l’entrepôt ! Je me frotte les mains, mais dans le dos.
N’empêche, elle parle super bien Miss France, et elle connait bien sa société. Enfin la société pour laquelle elle travaille, me dis-je.
- « Merci beaucoup pour cette présentation Mademoiselle ».
Là je vais lui poser 2 ou 3 questions auxquelles elle ne va rien comprendre, puis lui dire 2 ou 3 trucs bien techniques, ça va la calmer.
J’enchaîne les questions de découverte (genre je ne suis pas allé voir leur site web et je ne sais pas quelle surface font leurs locaux…) et lui ponds quelques statistiques sur les vols dans les entrepôts. Ah elle va moins faire la maline tiens !
Mais elle ne se dégonfle pas cette chipie ! Elle enchaîne à son tour et me parle de son installation de manière détaillée, des systèmes de sécurité en place, puis en plus elle remet en question mes statistiques, sous prétexte que son entrepôt est situé à Trifouillis-les-Oies, pas en plein Chicago.
Bon, elle est mignonne Miss France, mais faudrait voir à ce qu’elle ne m’apprenne pas mon job non plus… Elle commence tout de même à m’agacer doucement.
- « Vous savez Mademoiselle, les enjeux de sécurité sont, de nos jours, vraiment primordiaux, notamment dans votre métier, et sont au cœur des préoccupations des dirigeants responsables. Je ne remets pas en cause votre connaissance de l’entreprise, mais si cela ne vous dérange pas, je vois que l’heure tourne et que Monsieur Chassagne n’est pas encore arrivé. Savez-vous quand il va arriver afin que nous puissions commencer notre RDV ? ». Ah, je lui cloue le bec, et je te la remets en place illico. Retourne faire des tours de quartier sur ta moto, Miss France qui a trop regardé « Working-Girl » et veut assurer les RDV à la place du vieux !
C’est étrange tout de même. Nous sommes en Avril. Il fait bon dehors ; nous avons un printemps bien agréable. Mais là, la température vient brutalement de chuter de 10 bons degrés…
- « Je vais dimanche chez mon oncle, j’y verrai également Papa, et nous allons manger un rôti. Cela vous intéresse tant que cela de savoir quand je vais le voir ? ».
« Papa » ? « Rôti chez le tonton » ? Je ne suis pas trop la blague là… Va falloir que je demande les sous-titres… Enfin il y a tout de même une bonne nouvelle, si elle ne voit papa que dimanche, elle n’habite plus chez ses parents…
- « Euh… Je n’ai pas bien compris l’histoire du rôti et de votre papa… Là c’est Monsieur Chassagne que j’attends. Mais pour le rôti, c’est avec plaisir. A point et avec des frites je vous prie ». Et là je prends mon plus beau sourire.
- « Olivier, j’hésite. Je me demande si vous êtes juste un rustre, ou bien si vous êtes en plus un peu benêt. Je m’appelle Léa Chassagne. Papa – Monsieur Chassagne si vous préférez – a pris sa retraite il y a 3 ans et m’a confié la direction de cette société familiale, dans laquelle je suis rentrée moi-même il y a 8 ans ».
Oups la boulette… Je deviens tout vert, je crois. Je balbutie quelques mots, pas vraiment intelligibles. Je crois que je viens de faire THE boulette de l’année.
- « Euh je suis vraiment désolé Mademoiselle Chassagne, je ne pouvais pas deviner que vous étiez Monsieur Chassagne, enfin le PDG, vous me comprenez ? ».
- « Je vous confirme que je vous ai bien compris. J’aurais aimé constater la même chose de votre côté. Deviner, cela fait partie du métier de commercial non ? Comme poser des questions à son interlocuteur pour savoir quel poste il occupe… Mais là forcément, vous me voyez arriver, et je suis obligatoirement la secrétaire d’un vieux PDG, c’est ça ? Aussi vais-je vous raccompagner par là où vous êtes venu, et vous aller retourner dans votre bureau en ayant rien vendu ».
Et elle sourit, en plus ! Parce qu’elle m’a dit tout ça d’une voix posée et paradoxalement fort aimable…
Miss France me raccompagne, prend congé de moi fort poliment, et tourne ses talons pour retourner à ses occupations de PDG…
Tiens, pour le coup, je la reluque, cette fois. Je suis déjà grillé de toute façon. Même pas mal si elle se retourne.
Fichtre, elle se retourne ! Je ne suis pas grillé, je suis carbonisé maintenant ! Elle sourit et me fait un petit signe de la main, genre « bye le macho ». Mais ce sourire…

Maintenant, il va falloir rentrer voir le big boss… J’ai deux options : je lui mens et je lui dis que j’ai été reçu par un vieil harpagon récalcitrant… Ou je lui dis toute la vérité.
Bah, je l’aime tellement mon big boss, et je me suis pris un tel vent, que je vais prendre l’option de la vérité. En plus j’ai le moral dans les chaussettes après une telle déconvenue. J’accuse le coup tout de même, et j’appréhende sa réaction…

De retour au bureau, le visage un peu fermé, je me rends directement devant le bureau de mon patron bien aimé. Peut-être plus pour très longtemps mon patron, d’ailleurs, ne puis-je m’empêcher de penser.
- « Entrez Olivier ». Toujours sa voix aussi charmante le Président… Cela risque de changer sous peu.
Je m’exécute et attends qu’il m’invite à m’asseoir face à son bureau. Punaise, je me sens comme un petit garçon qui vient dire à papa qu’il a fait une grosse bêtise…
- « Alors Olivier, ce RDV ? Me ramenez-vous un beau contrat ? », me demande-t-il en souriant étrangement.
- « Malheureusement non Président… J’ai hésité à vous dire que j’ai rencontré un vieux grincheux qui ne voulait rien entendre… Mais la vérité, c’est que je me suis comporté comme un imbécile. La société est maintenant dirigée par la fille de Monsieur Chassagne. C’est elle qui m’a reçu… Je l’ai prise pour l’assistante du PDG, ai agit avec une condescendance totalement déplacée, et j’ai complètement manqué le RDV. Je me suis comporté comme un rustre et un débutant ». Le vieux va me passer un savon, même si il m’aime bien. Je veux être téléporté ailleurs immédiatement !
Mais non, et en plus il sourit !
- « Olivier, je suis ravi », me dit-il avec un grand sourire.
Ben punaise, je devrais foirer des contrats plus souvent… Mais j’avoue ne pas tout comprendre… Allez, je tente une vanne bidon !
- « Vous êtes ravi parce que vous allez me virer, Président ? ».
Il éclate de rire et me dit :
- « Absolument pas. Je me dois de vous faire quelques confidences. Tout d’abord, vous savez, tout du moins je l’espère, combien je vous estime [ouf !]. Cependant, et bien que vous ayez beaucoup appris durant toutes ces années, vous avez connu une dérive malheureuse, que connaissent parfois les bons vendeurs [ah quand même, je reste un bon vendeur ! L’honneur est sauf]. Vous êtes devenu trop sûr de vous, et parfois, cela peut vous nuire [et toc, dans tes dents Olivier]. Je suis heureux que vous ayez vécu ce revers parce que vous avez-vous-même analysé de manière très lucide ce qui s’est passé. Mais je me devais de vous le dire ainsi ».
Je suis repassé de l’état liquide à un état vaguement solide. Mais bon, « papa » m’a tout de même lancé un petit missile tactique. Certes bien mérité, mais ça pique.
- « Président, je vous remercie pour votre compréhension, mais là je viens de manquer une affaire faramineuse… J’ai honte, pour des raisons liées au business, et j’ai honte de m’être comporté comme un rustre, en plus ».
- « Vous n’avez manqué aucune affaire, Olivier ».
Hein, quoi, Miss France a envoyé un mail pour dire qu’elle m’avait trouvé génial et qu’elle voulait une installation complète ?
- « Ben si tout de même, j’avais calculé que… ». Je n’ai pas le temps de finir ma phrase que le vieux m’interrompt :
- « Vous n’avez manqué aucune affaire Olivier, parce que l’affaire, je l’ai signée il y a des années, et que nous renouvelons l’installation tous les 5 ans, depuis près de 20 ans ».
Hein ? Et je n’aurais jamais flairé cette affaire dans les dossiers de Valérie ? Moi le renard des surfaces de la vente de vidéosurveillance ? Nooooooon je n’y crois pas… Ce vieux filou m’a envoyé dans un traquenard !
- « Je me dois également de vous confier que le Monsieur Chassagne en question est mon beau-frère. Léa, sa fille, est donc ma nièce ».
Ca y est, là je suis décomposé. On dirait une pièce de Molière. Tout le monde est cousin/cousine ou frère/sœur ! J’avais raison, y avait bien un Harpagon !
- « Mais comment ai-je pu ignorer ce dossier depuis tant d’années, Président ? ».
- « Ah mon petit Olivier… Tout vieux briscard comme moi se réserve des dossiers « Direction », vous savez… Chassagne, c’est une affaire de famille pour moi. Si je vous y ai envoyé, j’avoue que c’est notamment parce que je savais que vous y apprendriez quelque chose sur vous, et je vois que j’ai eu raison à ce sujet. Et c’est également parce qu’un jour je me retirerai des affaires, et qu’il faudra bien qu’un commercial ambitieux reprenne ces fameux dossiers direction… ».
Ca y est, j’ai eu une révélation. Le vieux, c’est Jésus. Il m’a ressuscité en une phrase. S'il me dit « lève-toi et marche », je m’agenouille devant lui !
Je parviens à reprendre mes esprits, tant bien que mal. Je dois faire le tri vite fait au milieu de toutes ces informations. Le vieux vient tout de même de me dire en filigrane qu’il pensait à moi pour sa succession… C’est super émouvant, je suis au bord des larmes. Punaise, il me surprendra toujours ce mec !
- « N’empêche, je me suis bien planté sur cette affaire Président… ».
Et là il sourit, et me répète que le plus important est de m’en être rendu compte. Il me dit aussi qu’il faut que je fasse attention à ce type d’écueil. « Être trop sûr de soi Olivier, c’est un des plus grands dangers qui nous guette », me dit-il en me raccompagnant à la porte de son bureau.
- « Mais gardez confiance en vous, cela en vaut la peine. Apprenez juste à analyser plus, parfois. Et sachez que secrétaire, assistante ou PDG, chacun mérité une attention forte lorsque vous vous rendez chez un client ».
Ben ça je le sais chef, mais c’est pas ma faute. Déjà votre nièce elle m’a lobotomisé tellement elle est belle. En plus elle arrive en 1100 GSXR… C’est un coup bas…
Et voilà, encore une leçon de vie du big boss… Décidément, je l’aime ce mec.
- « Ah Olivier, une chose encore. Aimée et moi vous attendons dimanche à la maison. Comme vous le savez, il y aura mon beau-frère et Léa… A point le rôti, et avec des frites, c’est bien cela ? J’ai, je le crains, omis de vous dire que votre entretien avec Léa a été filmé. A votre insu, j’en conviens, mais j’avoue avoir beaucoup rit ! Venez avec des fleurs pour Léa également, je crois que vous lui devez bien ça », me dit-il en riant.
Le vieux filou, il m’a bien eu ! Il a du recevoir la vidéo de l’entretien par mail pendant que je revenais de Trifouillis-les-Oies. Il a bien du se marrer tiens. Enfin, je l’ai bien cherché, en même temps.
Pour Léa, j’hésite par contre. Dois-je venir avec un bouquet de fleurs ou bien avec une batte de base-ball ?

Nous voilà dimanche.
J’aime bien aller chez François (« le vieux », « big boss » et « Dieu », c’est au boulot. En dehors, je l’appelle François) et Aimée, sa femme. Elle me fait penser à ma défunte grand-mère. Nous allions souvent manger chez elle le dimanche, quand elle était encore parmi nous. C’était une grand-mère « gâteau », toujours aux petits soins pour nous. Aimée est comme ça. Et elle cuisine divinement bien !
Bon, j’ai acheté des fleurs pour Aimée. Et pour Léa aussi. Le fleuriste n’avait pas de batte de base-ball.
J’arrive chez Marcel et Aimée. Je suis super tendu en fait. Je me suis déjà payé la honte devant Léa quand je suis allé au RDV, et là je sens qu’on va remettre ça. Elle doit me détester, et l’idée de ce déjeuner doit lui couper l’appétit, tant je dois lui sortir par les yeux.
Tiens, il y a la 1100 GSXR devant le pavillon… De quoi me rappeler une de mes nombreuses boulettes de l’avant-veille. Toute la famille va se foutre de moi, je sens que ça va être grandiose.
Je sonne à la porte. C’est Léa qui ouvre. Je dois penser à poster sur VDM dès que je rentre !
Je me cache derrière les fleurs et lui dit :
- « Bonjour Mademoiselle Chassagne… Un idiot m’a chargé de vous remettre ces fleurs. Il n’a pas pu se rendre ici lui-même ».
Léa rit, et prend les fleurs. Je n’ai plus de cachette.
- « Bonjour Olivier. Et appelez-moi donc Léa. Le RDV, il est terminé, et aujourd’hui c’est repas de famille. Entrez donc. Grand benêt ! ».
Je sais être un type parfaitement obéissant parfois. J’ai tout de même l’impression de me rendre au tribunal. Le jury, c’est la famille du patron !
J’arrive dans le salon et voit effectivement Marcel, Aimée et un monsieur du même âge que Marcel. Je suppose que c’est le papa de Léa, mais comme j’ai bien retenu ma cuisante leçon, je dis juste « bonjour Monsieur » et attends qu’il se présente. On ne me prend pas deux fois à faire la même erreur !
Monsieur Chassagne me met tout de suite à l’aise. Il me dit que Marcel lui a beaucoup parlé de moi, et en bien. J’imagine déjà un « Par contre Léa m’a dit que vous étiez un gros nigaud ». Mais non. Jour de chance ! Allez, je ne posterai pas sur VDM ce soir, finalement.

Le succulent déjeuner d’Aimée s’est déroulé dans une ambiance fort chaleureuse.
Après le café, Marcel nous propose de passer dans sa « salle ».
Parce que le Marcel, il sait vivre, et il s’est aménagé une salle de billard (je l’aime, je vous le dis !) somptueuse. Un beau billard Breton haut de gamme, une pure merveille.
Je nous imagine déjà faisant un petit tournoi à 3, avec Monsieur Chassagne et Marcel. Erreur ! Léa nous emboîte le pas. Elle vient jouer avec nous. Là, ça sent la revanche ma chère Léa ! Autant je me suis pris une veste à ton bureau, autant là, le billard, c’est mon truc.
Je ne fais jamais deux fois la même erreur ai-je dit un peu plus tôt ?
Ben voilà, là c’est fait. Erreur de jugement. Encore une. Léa m’a mis une rouste au billard !
Je regarde Marcel, qui est plié de rire en regardant ma tête.
Décidément…
- « Cher Marcel, ne vous méprenez pas, je me doutais que Léa était une bonne joueuse de billard. J’ai l’air crédible ou pas ? ».
Et là j’ai droit à 3 personnes hilares face à moi. Finalement, je vais peut-être poster sur VDM…
Malgré cela, nous passons tous ensemble une après-midi très agréable. J’évite juste de trop la ramener, et préfère écouter les autres convives.
Marcel m’a regardé à un moment, et il a sourit. Genre « ça y est, tu vois petit, tu commences à comprendre »…
Nous nous quittons à regret, tant cette journée a été sympathique. J’ai encore pas mal appris.
Bizarrement, Léa m’a glissé un papier dans la poche, juste avant que je ne parte. Elle m’embrasse sur la joue et me dit « à bientôt ».
Je vais vers ma voiture… Ah, sale gosse impatient, je regarde le papier. C’est le numéro de téléphone de Léa. Comme elle sait que je suis un peu demeuré, elle a ajouté un petit mot :
« Cher Olivier, il s’agit de mon numéro de téléphone personnel. Pour le professionnel, si vous en avez besoin, demandez donc à tonton, il a une fiche très bien renseignée sur notre société ».
Je ne peux m’empêcher de rire en lisant ces mots. Léa est sur la pas de la porte et m’a vu lire le mot.
- « Décidément, je me fais prendre sur le fait à chaque fois ».
Elle a sourit et m’a dit :
- « Surprenez-moi Olivier, une prochaine fois ».
Si il faut que j’aie l’air moins nigaud pour la surprendre, c’est pas gagné. Léa a une capacité à me rendre crétin qui me laisse songeur, tout de même.

J’ai donné ma démission à Marcel peu de temps après ces faits. Ca a été un moment très difficile, ce jour là. Parce que j’ai bien aimé mon métier. Et surtout Marcel. Mais il y a une fin à tout, ou presque.
Marcel, en bon vendeur, m’a juste posé une question ce jour là :
- « Mais pourquoi démissionnez-vous Olivier ? », m’a-t-il demandé simplement…
- « J’ai adoré toutes ces années passées avec vous Marcel. Je vous suis très reconnaissant pour tout ce que vous m’avez appris. Mais j’ai bien réfléchit à ce qui s’est passé ce jour là en allant en RDV chez Léa. Après avoir décortiqué et analysé la chose, je me suis dit que c’est vrai, j’ai été un bon vendeur. Mais je suis devenu con, très con, parfois. Prétentieux, arrogant, sûr de mon fait. Comme je vous l’ai dit, vous m’avez apporté énormément, professionnellement. Mais le plus beau de ces cadeaux, et en fait il s’agit d’un double cadeau, c’est de m’avoir fait rencontrer Léa. Et de m’avoir permis de comprendre ce qui m’arrivait. Aujourd’hui, j’ai besoin de repartir sur autre chose ».
Marcel a très bien réagit. Il m’a dit qu’il était un peu déçu, parce qu’il avait vraiment pensé à moi pour sa succession. Mais il a ajouté qu’il comprenait ce que je lui disais.
- « Vous n’êtes pas devenu « con », Olivier. La preuve, vous vous en êtes aperçu. Et à temps. Je trouverai bien quelqu’un pour prendre la relève. J’ai moi aussi passé de belles années auprès de vous, et vous m’avez souvent rappelé le jeune homme que j’ai été. C’est un choix courageux que vous faites, et j’en suis heureux pour vous. D’autant que maintenant, vous faites partie de la famille. Et si jamais j’ai besoin de vous, je vous botterai les fesses si vous ne répondez pas présent à l’appel ».

Cela fait maintenant 6 mois que Léa et moi vivons ensemble.
J’ai réalisé un vieux rêve. J’ai racheté un petit atelier de mécanique moto. Je « bricole », je vends quelques motos également. Je fais attention à ne pas avoir d’à priori lorsqu’un client rentre dans le magasin.
Léa, de son côté, est toujours PDG des établissements Chassagne. Nous avons trouvé notre équilibre ainsi. Elle a appuyé mon nouveau choix professionnel à 100%.
Parfois, lorsqu’elle part au bureau le matin, elle prend ma voiture et me laisse sa 1100 GSXR.
- « Je compte sur toi pour la révision, mon chéri. Prends-en bien soin, de ma mobylette. Et de toute façon, je te surveille, j’ai fait installer une caméra dans ton atelier par tonton Marcel. Si tu fais des bêtises, gare à toi ! ».
Sa mobylette… Une caméra de chez Marcel… Non mais quelle chipie parfois !
Mais qu’est-ce que je l’aime, et qu’est-ce que nous sommes heureux ensemble.

Amitiés,

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Message  De Sombrelame Dim 6 Jan - 23:09

magnifique cheers

De Sombrelame

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Message  Nigel Loring Mar 8 Jan - 17:13

Ouais, j'ai beaucoup aimé aussi Smile

Nigel Loring

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